Quand les bénévoles ne sont pas écoutés, et que cela se répète, le découragement et parfois l’abandon s’en suivent. Il en est de même avec les adhérents et les salariés des associations. Echanges avec Frédéric, enseignant tennis, où nous abordons cette question par si marginale que cela finalement…
Bonjour Frédéric, ta réaction a donné le titre de cet article. Est-ce une situation que tu as déjà vécue ?
F. : Oui, mes collègues et moi avons souvent été confrontés à l’entêtement des bénévoles du bureau. Par exemple lorsqu’une personne veut mettre en place des procédures, pour manager l’association comme une entreprise, et que l’on ne tient pas compte de la structure purement associative et absolument pas hiérarchisée. Une structure qui fonctionnait plutôt bien, particulièrement dans notre quartier, grâce à la présence des enseignants depuis 25 ans dans le quartier. On arrive à des situations où les échanges sont tendus car ils avaient toujours l’impression que l’on faisait les choses dans notre coin. Mais eux à 21h30 sur les terrains, ils n’y étaient pas. Il y avait de la méconnaissance et ça ne peut pas marcher quand on doit diriger une association avec des salariés qui font l’essentiel du boulot.
Les discussions à n’en plus finir pour le paiement des heures complémentaires sont usantes à force.
TN : Et vis-à-vis des adhérents ?
F. : Il y a aussi des décisions qui sont prises sans concertation. Comme lorsqu’on veut réduire le nombre des compétitions pour raisons économiques. Alors que certains adultes étaient adhérents depuis des années, précisément pour ces compétitions.
Lorsque l’on devient dirigeant sans avoir été auparavant compétiteur, il est normal d’avoir du mal à appréhender le côté compétition-loisir qui faisait la vitrine du club et le côté loisir tout court qu’il fallait promouvoir plus que tout.
TN : Est-ce que c’était dû au parcours professionnel des dirigeants de l’époque ?
F. : Certainement. Le secrétaire général travaillait dans le médical et voulait faire fonctionner les enseignants comme une équipe médicale à qui on donne des ordres de l’urgence.
TN : quelles ont été conséquences de ces choix ?
F. : Dans un club ; si vous bridez les compétiteurs en ne leur permettant plus de jouer autant qu’ils le veulent, c’est l’osmose des équipes qui est brisée. C’est des parti pris pour l’un ou l’autre camp. Ça va jusqu’à l’abandon pur et simple de la compétition par certains au vu de l’ambiance délétère.
C’est des adultes qui ne se réinscrivent pas. Donc des créneaux d’heures pas faciles à remplir, en particulier tôt en matinée. C’est l’incompréhension des parents des jeunes adhérents quant à des affectations fantasques de leurs enfants.
TN : c’est comme si on avait rompu l’équilibre de la machine…
F. : C’est tout à fait ça. On a fragilisé l’association. On nous faisait passer des messages anxiogènes sur des problèmes de trésorerie, des problèmes de paiements des charges, de potentiel dépôt de bilan … alors que sur le terrain, les cours à l’année et les stages pendant les vacs scolaires fonctionnaient bien. On avait des taux de reconduction de 75% !
TN : Comment avez-vous géré cela en interne ?
F. : Difficilement ! D’un côté les enseignants ont fait bloc et on a tenu à rester irréprochables vis-à-vis des adhérents sur le terrain. De l’autre le secrétaire a essayé de rallier à lui les autres membres du bureau. La pandémie a suivi et pour la faire courte, cela s’est soldé par le départ des membres du bureau qui avait tenté de mettre en doute le fonctionnement mis en place par le directeur sportif.
TN : quels enseignements tires-tu de cette expérience ?
F. : Le bureau d’une association doit être composé d’au moins un élément de terrain, qui peut être le relai des enseignants. De même il bon d’avoir comme dirigeants des personnes qui ont une vision élargie de tout ce que réclame le fonctionnement d’une très petite entreprise, mais avec les particularités d’une association
Des causes diverses, des conséquences similaires
On voit dans ce témoignage les conséquences que vous avez sans doute déjà constaté dans un club lorsque va à l’encontre de de ce que veulent les gens et les forces vives du club :
C’est l’incompréhension souvent suivie de l’abandon. Les premiers signes viennent des gens les plus impliqués : les bénévoles et les salariés. Puis ce sont les adhérents qui vont, dans le meilleur des cas, manifester leur mécontentement. Mais le plus souvent, pour éviter de faire des vagues et ne pas se trouvé impliqués dans les disputes de clans, ils vont quitter le club sans rien dire.
Sans parler de dissensions, on peut constater les mêmes conséquences de pertes d’adhérents lorsque les administrateurs ne voient pas que les attentes des adhérents ont évolué. C’est malheureusement le cas de quelques sports ou des clubs qui reproduisent le fonctionnement du vingtième siècle, « parce qu’on a toujours fait comme ça… »
D’une façon générale, les adhérents n’apprécient pas du tout les ambiances de clans. Ce simple constat doit vous mettre la puce à l’oreille.
Une évolution anormale à la baisse du nombre d’adhérents d’une année sur l’autre doit vous amener à vous poser la question, voire à vous remettre en question. Ce n’est évidemment jamais simple.
Que faire alors ?
Ne pas rester seul. Il faut élargir le cercle des personnes décisionnaires. Comme l’a bien décrit Frédéric, il faut que l’équipe soit composée de personnes du terrain, en prise directe avec les adhérents.
Il y a aussi un équilibre à préserver. Garder suffisamment d’anciens pour la mémoire de ce qui a été fait, et un renouvellement à petite dose avec des gens qui ont un œil neuf sur le fonctionnement du club. Tout est question d’équilibre. Mais ce n’est pas facile.
Thierry Nauleau
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