Les recettes habituelles de développement économique qui sont proposées aux associations sportives présentent toutes un inconvénient majeur : les bénévoles ne disposent pas des compétences et des moyens requis pour les mettre en œuvre.
Des ressources qui ne sont pas à la portée des bénévoles
Lorsque l’on parle de pérennisation économique des associations ou de l’emploi sportif, il est fréquent de lire et d’entendre qu’il faut diversifier les ressources financières. Mais par quoi diversifier ?
Le mécénat est largement mis en avant. Si sur le papier l’idée est séduisante, dans la pratique on observe que les donateurs sont, à plus de 95 %, des adhérents eux-mêmes ou de leurs proches. Ce que j’appelle le premier cercle de connaissances.
Pour que le mécénat fonctionne, il faut soit s’appuyer sur un réseau important de connaissances, soit disposer de relations auprès des entreprises. Or la majorité des associations sportives ne disposent ni de l’un ni de l’autre.
Le sponsoring reste très attractif pour les dirigeants bénévoles. Mais en plus de nécessiter un réseau, il exige de savoir ce que l’on peut vendre (quand on est une association) et comment le vendre. Le manque d’attractivité de la plupart des sports, et pour les plus pratiqués cette attractivité ne se matérialise pas avant les niveaux des championnats de France amateurs. Associé au manque de compétences sur ces sujets, cela explique que les recettes des clubs soient très décevantes (- de 6% selon mes propres statistiques).
Le sport santé ne décolle pas
Les retours d’expériences mettent en évidence deux obstacles majeurs à son développement dans le sport amateur :
Les fédérations y ont vu une opportunité d’augmentation du nombre des licences sportives, éventuellement de diversification de ressources pour leurs clubs, mais sans tenir compte de l’image que le public a de leur sport. Si les bienfaits d’une pratique sportive pour la santé sont répandus, le public aura du mal à associer l’image d’un sport et ce qui est bon pour sa santé. En cause, l’image de la performance qui est prédominante et voulue par les fédérations sportives. Le succès local d’une activité sport santé d’un club sportif dépend pour beaucoup des qualités de l’animateur.
Par ailleurs ces activités entrent en concurrence avec les maisons sport santé, du réseau sport santé. L’accompagnement proposé par ces structures est plus complet, se destine à un public plus large et il dispose d’une antériorité à ce que proposent les fédérations.
Des ressources fragiles par nature
En incitant les clubs à vendre des services ou des marchandises à des publics extérieurs à l’association, on tend à fragiliser les associations. Ces publics constituent une clientèle très occasionnelle qui est difficilement prévisible.
En cas de crise, comme nous le vivons en ce moment, les entreprises sont les premières à décliner l’offre des clubs. Et il est alors très difficile de trouver des ressources de substitution.
Il y a un risque important de déficit budgétaire lorsque vous voulez financer l’emploi sportif (une charge fixe) par des revenus trop aléatoires. Lorsqu’une association employeur cumule deux exercices déficitaires consécutifs, le risque de licenciement économique augmente alors fortement.
La fidélisation apporte de la stabilité au club
Si les sports les plus médiatisés constatent un afflux cyclique de licenciés après chaque coupe du monde ou à la suite d’un titre olympique, il n’en est pas de même dans beaucoup de disciplines.
La question que l’on me pose souvent est comment attirer davantage de nouveaux adhérents ? Si cette question est logique dans une optique de développement, elle l’est moins quand il s’agit de sauver un club.
Il est admis qu’un turn-over de 30% est la norme dans les associations sportives. Ce chiffre n’est qu’un élément statistique. Il n’a jamais été un objectif. Exprimons cela en taux de fidélisation. Lorsque le taux de fidélisation des adhérents est supérieur ou égal à 70 %, il y a une correspondance avec la part des ressources propres. Elles sont inférieures à 52% en moyenne pour les clubs qui ont un taux de fidélisation inférieur à 70 %. Les ressources propres dépassent les 64% (en moyenne) quand le taux de fidélisation est supérieur à 70%.
C’est comme si les clubs qui ont des difficultés à fidéliser partaient avec un handicap de 12% de leur budget. Donc 12% de recettes de substitution qu’il faut trouver et qui ne rentrent que grâce à l’énergie des bénévoles.
Êtes-vous sensibles à la fidélisation ?
La fidélisation est aussi une question de culture d’association. Elle est très correcte en équitation. L’exemple du rugby nous montre qu’elle peut l’être aussi dans un sport collectif (lire La fidélisation des jeunes au rugby). L’une des raisons de ce manque d’intérêt pour la fidélisation est que les dirigeants des clubs d’aujourd’hui n’y ont pas été sensibilisés dans leur parcours de joueur. La nature humaine veut que l’on reproduise, consciemment ou pas, ce que nous avons appris.
Mis à part un passage à des outils numériques, les méthodes d’enseignement et les modalités de pratiques sportives n’ont pas fondamentalement évolué depuis 40 ans. Le sport n’est pas qu’une affaire de technique. Le sportif est acteur de sa formation et de sa performance. S’il n’est pas satisfait de sa prestation, s’il n’est pas satisfait de ce qu’il a vécu au cours de sa saison sportive, il se désintéressera. Quel que soit son âge.
Les enseignants, acteurs de la fidélisation
Lorsqu’une personne s’inscrit dans une association sportive pour la première fois, elle ne connait ni les gens, ni le fonctionnement, et bien souvent, elle ne connait que peu de chose sur ce sport.
Les enseignants sont les personnes avec qui le ou la nouvelle venue va passer le plus de temps dans sa première année de vie au club. C’est grâce à l’enseignant que les nouveaux licenciés assimilent la plupart des valeurs du sport et du club.
Peu d’entre-eux sont formés, ou sensibilisés à ce sujet capital pour un club. La mise en pratique exige du temps. Le quotidien d’un bénévole lui laisse peu de disponibilité pour s’occuper de cette mission supplémentaire. Et le numérique n’aide que très partiellement à ce processus car il repose sur une qualité essentielle : la mise en confiance.
Un enjeu pour la pérennisation des associations sportives
Bien qu’elle exige une approche particulière, la fidélisation fonctionne grâce aux fondamentaux d’une association : l’apprentissage des savoir-faire, la convivialité, la progression sportive. Elle ne requiert pour ainsi dire que tu temps, de l’attention et de l’organisation.
Parce que les recettes qu’elle génère sont plus stables et plus fiables que les recettes extra sportives, elle est la clé d’une pérennisation réussie de l’emploi sportif.
Thierry Nauleau
Pour vous former à la fidélisation des pratiquants >> lire la suite
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