La plupart des associations sportives ne sont pas prêtes à absorber les importantes augmentations de charge consécutives à la hausse des prix de l’énergie et des carburants.
On distingue toutefois quelques différences d’approche liées à un choix de gestion ou à un modèle économique. Les préconisations sont assez proches de ce que l’on a pu avancer pendant la crise du COVID.
Une disparité de situations
La proportion des associations sportives qui sont propriétaires de leurs infrastructures est relativement faible. Devant assumer par elles-mêmes leurs factures, ce sont les plus impactées pour le moment. Toutes les tailles de structures, employeuses ou non, sont concernées.
Un grand nombre d’associations bénéficient encore de la gratuité des fluides et de l’énergie. Ce sont à ce jour celles qui sont le moins impactées du point de vie économique. Certaines sont inquiètes car les communes, qui voient elles aussi leurs factures exploser, cherchent par tous les moyens à réduire leurs dépenses.
C’est ce qui se passe déjà quand quelques grandes villes avec une baisse annoncée de l’enveloppe des subventions aux associations. Tous les secteurs associatifs sont concernés. Les petites communes semblent moins touchées, en proportion du moins.
La réduction de la température dans les gymnases (comme à Amiens) exige à minima une adaptation des pratiques car comme le dit un responsable de club : « la métropole chauffait déjà très peu les gymnases ». Par températures négatives, le manque d’isolation rend les salles vétustes impraticables. Localement et exceptionnellement les dirigeants de club peuvent être amenés à annuler quelques entrainements pour les plus jeunes. Des clubs l’ont envisagé, comme ce fut le cas en décembre dernier à Bernay (27).
Même si les parents s’en plaigne, peu de clubs constatent le retrait des jeunes enfants des sessions d’entrainement. La réduction de la durée d’éclairage des terrains de jeux par contre rend les entrainements quasi impraticables.
La hausse des prix des carburants impacte le transport des jeunes. Les clubs qui disposent de minibus absorbent pour le moment cette hausse, mais les clubs qui demandent aux parents d’emmener les enfants sur les compétitions font face à des demandes insistantes de prise en charge. La réduction d’impôt ne fait plus recette. D’autres, comme le club de Canoë Kayak de Ham (80) ont choisi de réduire le nombre de compétitions auxquelles leurs athlètes participent. Ailleurs, comme en Champagne Ardennes, les clubs ont l’habitude de faire de grands déplacements, et donc de supporter un budget carburant conséquent, surtout depuis le redécoupage des nouvelles régions.
Des partenaires qui ne peuvent plus suivre
Nous relevons déjà un nombre significatif d’entreprises partenaires qui annoncent suspendre ou retirer leur participation. Cela concerne particulièrement les artisans, commerçants et les TPE qui constituent une part importante des partenaires privés des clubs.
Les situations sont très variables d’une association à l’autre, d’un territoire à l’autre, mais globalement tout le monde est impacté. Même si les chiffres ne sortent pas dans l’instant, il est probable qu’au moment de faire les comptes pour les assemblées générales, les cas de déficits soient nombreux.
Une cascade de conséquences
Les conséquences touchent autant l’organisation que l’économie des clubs sportifs amateurs.
Du point de vue économique, la crise du COVID-19 avait soumis les associations à un arrêt brutal de leurs recettes, mais aussi à une diminution proportionnelle de leurs charges de déplacement. Dans le cas des associations sportives qui encaissent une part importante de leurs recettes au moment des inscriptions, l’impact a été modéré, d’autant plus pour les associations employeuses qui ont bénéficié du fond de solidarité.
Aujourd’hui les charges ont rapidement augmenté mais les recettes n’ont pas évolué. Il semble très peu probable que l’on revienne rapidement à un niveau de prix de l’énergie correspondant à celui d’avant la guerre en Ukraine. Rappelons au passage que le prix du gaz est fixé sur un marché international de l’énergie, et que le prix de l’électricité est indexé sur celui du gaz. Tout cela a bien une origine spéculative.
Nous allons vers une situation où les clubs vont dans un premier temps puiser dans leurs réserves. Et si du fait des conditions de pratique (froid et manque d’éclairage) les parents réfléchissent à deux fois avant d’inscrire un enfant pour une activité, alors la rentrée 2023 sera compliquée. D’autant plus dans un contexte récurrent de baisse des subventions.
Du point de vue de l’organisation, le manque d’entrainement aura forcément un impact en termes de performance, mais tous les clubs seront soumis aux mêmes désagréments. Le risque pour le moment est jugé faible en ce qui concerne l’engagement des cadres bénévoles, mais il ne faudrait pas fonctionner trop longtemps dans un mode dégradé.
Comment anticiper ?
Les associations cherchent dans l’immédiat à limiter l’effet de froid dans les gymnases, car c’est la condition pour continuer d’accueillir les enfants. Les passoires thermiques sont nombreuses en matière d’infrastructures sportives. On pointait déjà du doigt cette faiblesse il y a 10 ans.
Les associations maitrisent depuis longtemps leurs coûts. Pour aller plus loin, il faudra faire des choix, comme nous l’avons évoqué par le choix des compétitions pour limiter les frais de carburant. Dans certains cas, il conviendra de réexaminer la pertinence de certaines activités déficitaires.
Les associations employeuses peuvent dans certains cas solliciter les aides accordées aux TPE sous certaines conditions. Il s’agit bien sûr des associations qui payent elles-mêmes leurs factures de gaz et d’électricité.
Selon Francis Boitel, vice-président de la communauté de communes de l’Est de la Somme en charge des sports, le modèle économique des associations devra évoluer.
Nous partageons cette orientation. Des causes inverses à celles de la crise du Covid (absence de recettes) entrainent des préconisations similaires :
- Disposer de réserves pour surmonter les crises. La question principale sera de savoir comment faire évoluer le modèle économique des clubs afin de reconstituer les réserves. Il faudra sortir du dogme du budget équilibré pour aller vers la recherche d’un excédent, même modeste. C’est ainsi que procèdent les associations employeuses.
- Limiter la proportion de recettes considérées comme fragiles. Le sponsoring de proximité en est la malheureuse illustration.
- Jouer au maximum la carte de la fidélisation. Et diversifier les modalités de la pratique sportive.
A plus long terme, il faudra bien rénover les infrastructures sportives, ne serait-ce que pour limiter les coûts. C’est une occasion unique de profiter de cette réflexion pour actualiser les structures aux attentes actuelles et aux futures formes de pratiques.
Le sujet n’est pas clos. Et c’est une nouvelle période difficile qui s’annonce pour le sport amateur.
Thierry Nauleau
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